CNESERAAV

Déclaration liminaire de FO Enseignement Agricole, élan commun et UNSA pour le CNESERAAV du 14 décembre 2023

Monsieur le Président, Monsieur le Directeur Général,

Nous boycottons ce CNESERAAV par solidarité avec nos collègues de l’enseignement technique agricole dont le mécontentement se cristallise autour du mode de calcul des obligations réglementaires de service des enseignant·es, impulsé “en douce” par la DGER, sous prétexte d’une rénovation pédagogique. Nous dénonçons vigoureusement le lien établi par la DGER entre les obligations de service des enseignant•es et les rénovations pédagogiques. Ces deux aspects ne doivent pas être connectés, car sans aucun rapport. Il n’est pas acceptable que de nouveaux modes de gestion s’élaborent et s’imposent sans concertation, de surcroît dans le non-respect des règles en vigueur au détour d’un webinaire de veille de rentrée avec des personnels d’encadrement mis eux-aussi devant ce fait accompli.

Il est essentiel de rappeler que nous soutenons pleinement la pluridisciplinarité, élément emblématique des formations et de l’enseignement agricole, sous-entendre l’inverse et en sus devant la Représentation nationale est indigne.

Lors de son audition au Sénat, le ministre semble ne pas avoir pleinement compris nos préoccupations. Bien que le sujet puisse sembler technique, ses conséquences sont indéniables. Les enseignant·es soumis à ce nouveau mode de calcul doivent travailler davantage pour maintenir leur rémunération, voire subissent une baisse. Les arguments du ministre, prétendant que ces mesures ne visent pas à réaliser des économies et pensant pouvoir nous convaincre que 0,77 équivaut à 1 heure, ne dissipent assurément pas le mécontentement de nos collègues. Derrière cette mise en œuvre, ils perçoivent clairement les implications budgétaires et la remise en cause de leur statut. À mesure que la colère s’intensifie, la confiance envers le ministre et ses intentions s’amenuise. Les relations sociales au sein du ministère pourraient en être durablement affectées – c’est aussi ce que l’ensemble des syndicats (CGT, FO, FSU, UNSA et SUD) ont voulu signifier en boycottant le CSA M du 29 novembre.

Notre constat est alarmant : la consigne de la DGER est appliquée de manière disparate, touchant non seulement des régions ou lycées possiblement en déficit de DGH et les filières de bac pro rénovées, mais aussi certains établissements, avec une extension à d’autres filières et activités – soit bien au-delà de la consigne de la DGER, mais dont on ne mesure ainsi l’effet de dérégulation qu’elle induit dans le dispositif enseignement agricole. Il est d’ailleurs à noter que la DGER saisit d’un certain nombre de dérégulations manifestes depuis le 14 novembre dernier ne semble pas du tout empressée de recadrer sans délai ce qui se doit de l’être. Ces situations ne sauraient perdurer.

Les aspirations gouvernementales d’améliorer les rémunérations des enseignant·es par le socle et le pacte – et cela quoi qu’on puisse par ailleurs penser de ces mesures – sont ici contredites de la pire des manières. Il est en effet incompréhensible que dans le ministère de l’agriculture, ces efforts soient contrecarrés par des ajustements qui réduisent les revenus de celles et ceux qui se dévouent pour l’éducation de nos jeunes. C’est un véritable tour de passe-passe pour reprendre d’une main ce qui a été donné de l’autre.

Quelle brillante stratégie nous offre la DGER et notre ministère ! On nous parle d’audit pour améliorer l’attractivité du métier d’enseignant·e mais en réalité, à travers ce mode de calcul, il est, on ne peut plus clair, qu’on cherche en gestionnaire prétendument astucieux à réduire le coût horaire des enseignant·es en les faisant travailler davantage pour un salaire inchangé. C’est comme si la DGER avait décidé d’organiser un séminaire accéléré intitulé “Comment décourager les candidat·es en 10 leçons”, la première étant : “Laisser les enseignant·es déconcerté·es face à une équation où plus de travail ne rime plus avec un gain”. Les candidat·es potentiel·les, voire les nouveaux·elles entrant·es, ne pourraient pas rêver mieux pour prendre leurs jambes à leur cou.

Dans un contexte où l’enseignement agricole est au cœur des politiques agricoles, confronté aux défis sociétaux, environnementaux et climatiques, auquel le Projet de Loi d’Orientation Agricole est censé répondre, le mépris affiché envers nos collègues et en fait leurs communautés éducatives dans leur ensemble est, redisons-le, d’autant plus incompréhensible.

Enfin, cette façon de faire du ministre, qui se dérobe continûment au nécessaire échange de fond avec l’Intersyndicale, cela depuis le 23 octobre dernier, date de dépôt du préavis initial, tout en se réclamant « en même temps » d’être un homme de dialogue, n’est pas responsable. Refuser une rencontre avant Noël, en considérant que de renvoyer l’échange direct au 9 janvier prochain serait à même permettre de trouver les voies de l’apaisement, c’est soit se tromper lourdement, soit se moquer du monde. Or, le courrier d’invitation adressé aux OS du CSA M le 8 décembre coche clairement la seconde case, et sonne ainsi comme une provocation ! La posture n’est pas tenable, moins encore responsable vis-à-vis du ministère et des personnels dont il a accepté la charge. Il porte l’entière responsabilité du conflit social majeur qui est à présent installé pour durer !

Nous boycottons aussi ce CNESERAAV en raison de choix budgétaires pour l’enseignement supérieur agricole que vous avez fait pour 2024 et les années suivantes.

Déshabiller Pierre pour habiller Paul est votre clé de répartition budgétaire et de ce fait vous rompez le contrat moral que vous aviez avec les écoles nationales vétérinaire pour le plan de renforcement : c’est inacceptable ! Vous nous avez vanté ce plan de nombreuses fois et le rappelez à chaque occasion pour faire passer la pilule de l’augmentation de 75 % du nombre d’étudiant·es dans les ENV qui est prévu dans le PLOAA et précisé dans le PLF 2024. Nous ne contestons absolument pas les besoins des écoles d’ingénieurs puisque le nombre d’étudiant·es ingénieur·es agronomes doit augmenter de 30 % d’après les mêmes projets de loi, mais le plan de renforcement des ENV n’étant déjà pas à la hauteur des besoins, cette répartition de la misère est insupportable surtout qu’elle est faite là encore subrepticement car dans la note de présentation pour ce CNESERAAV vous indiquez : « renforcement des ENV, dont augmentation du plafond d’emploi des ENV pour leur permettre de recruter sur leur budget propre 12 (4*3) enseignants-cliniciens contractuels, la contribution ministère à la masse salariale (0,5 M€) a été revue à la hauteur de l’activité générée également par ces cliniciens dans les centres hospitaliers universitaires vétérinaires (CHUV) » ce qui en langage codé par la DGER veut dire financement à hauteur de 60 % de ces postes et charge à ces enseignants cliniciens de financer les 40 % de leur rémunération par leurs activités cliniques ! Comment feront les écoles dont les CHUV sont déficitaires ? C’est mettre certaines ENV en difficulté et la somme dégagée pour les agros reste de surcroît insuffisante. En outre le niveau du gel passe de 5 % à 5,5 % hors rémunération (titre 2) car nos « dépenses sont plus modulables » d’après la circulaire sur la gestion budgétaire 2024 ; de qui se moque-t-on ? Enfin si on regarde les budgets de fonctionnement de l’enseignement supérieur agricole sur le triennal 2024-2027, ils sont stables donc exit la fin du plan de renforcement des ENV ! Encore une fois les promesses de la DGER ne tiennent que ceux qui y croient ; quelle honte !

Pour terminer nous tenons à souligner la façon dont le ministre maltraite de fait ses personnels avec la carence du SRH qui n’a plus la capacité humaine de procéder aux mesures de gestion courante. Ainsi de nombreux enseignant·es chercheur·es ont remarqué que leur promotion de corps, de grade, d’échelon et de chevrons n’a pas été faite sans avoir aucune information.

Nous venons d’avoir des informations début décembre par des collègues d’un établissement qui nous ont indiqué :

« Après avoir relancé nos RH à plusieurs reprises qui ont dû relancer le SRH ministériel nos RH ont obtenus la réponse suivante du SRH du MASA :

  • Les changements de corps MC à PR 2023 seront pris en charge sur paie de décembre 2023,
  • Les avancements de grade MC et PR 2023 seront pris en charge sur paie de Janvier 2024,
  • Les changements de chevron et échelon depuis le 1er septembre 2023 seront pris en charge au plus tôt sur paie de Janvier 2024, au plus tard sur paie de Février 2024 »

3 à 5 mois de retard et en plus sur une autre année, c’est parfait pour les déclarations d’impôts !

À vouloir supprimer toujours plus de fonctionnaires, les gouvernements successifs ont attaqué le squelette de certains services de notre ministère qui ne peuvent plus remplir leur fonction mais ce n’est pas grave dans ce cas puisque cela ne concerne que les personnels !