CHS

Déclaration liminaire FO FSU du CHSCT M spécial enseignement technique du 12 novembre 2019

Nous tenons ici à saluer, avec gravité et colère, la mémoire de notre collègue directrice d’école, Christine Renon, qui s’est suicidée le 21 septembre dernier,  en laissant un témoignage édifiant, qui a marqué le monde de l’éducation et au-delà, de la Fonction publique.

La gravité et la colere, nous les partageons avec l’ensemble des personnels empêchés dans leur travail, dans leur mission et qui réclament le respect.

Car en effet, la mort de notre collègue sur son lieu de travail a obligé l’Éducation Nationale à prendre la mesure de la réalité de la souffrance au travail des personnels. Les chiffres annoncés lors d’un CHSCT-M extraordinaire le 6 novembre sont terribles :  58 suicides sur l’année scolaire 2018-2019 et déjà 11 recensés depuis le début de l’année scolaire 2019-2020 parmi les personnels de l’Éducation … 

L’enquête menée par une organisation syndicale au sein du Ministère de l’Éducation nationale  montre que 73% des personnels d’éducation estiment que leur travail a dégradé leur santé ces derniers mois et 93% d’entre eux estiment que leur charge de travail s’intensifie.

La dernière fois que le CHSCT-M a abordé la question des actes suicidaires au sein du ministère de l’agriculture, c’était en novembre 2016, à la suite du suicide d’un agent. Le Secrétaire général avait alors reconnu trois suicides dans la période précédente, dont deux reconnus imputables au service. Depuis, rien. Pour l’instant, et ceci malgré nos alertes régulières, cette expertise n’a pas été menée. Pourtant il serait illusoire de penser que les conditions de travail et leurs conséquences seraient différentes pour les personnels du MAA, alors que les réformes que nous subissons sont les mêmes.

Nous le redisons encore aujourd’hui, le travail ne doit pas porter atteinte à la santé. Personne n’a le droit, par ses agissements, ses décisions, ou ses manquements, de porter atteinte à la santé d’autrui, pas même un employeur envers ses salarié·es ou ses agent·es.

Déni des difficultés auxquelles sont confrontés les personnels, absence de prévention primaire, refus de mise en œuvre des prérogatives des CHSCT, refus des responsabilités d’employeur… Le tableau que nous sommes forcé·es de dépeindre est bien sombre et la dilution des CHSCT dans le futur Conseil social ne fera qu’aggraver la situation.

Lorsque la situation se dégrade, lorsque l’épuisement professionnel, la dépression ou l’acte suicidaire surviennent, notre employeur et ses représentant·es présidant les CHSCT ont vite fait de se défausser en pointant de supposées fragilités personnelles, qui lorsqu’elles existent, découlent bien souvent et justement de la dégradation des conditions de travail, de l’impossibilité de remplir la mission, de la perte de sens du métier, de l’absence de soutien, d’aide ou de reconnaissance de l’institution. Et souvent même, cette perte de sens découle des décisions prises et des réformes élaborées et mises en œuvre par notre employeur.

Ces réformes menées sans prise en compte de l’expertise et de la parole des personnels, sans aucune considération a priori des besoins d’amélioration des conditions de travail ; ces réformes menées sans accompagnement digne de ce nom ; ces réformes menées tambour battant au rythme des alternances politiques, nous en démontrons et dénoncons régulierement les effets déléteres.

A ce jour l’impulsion politique n’y est pas. L’absence du ministre aux réunions du CHSCT illustre une indifférence manifeste pour les questions de santé, de sécurité et de conditions de travail.

Une des préconisations du rapport parlementaire sur la prévention dans la fonction publique, intitulé « Santé, sécurité, qualité de vie au travail dans la fonction publique : un devoir, une urgence, une chance », a retenu notre attention. Il s’agit de la nécessité de réaliser des études d’impact sur les conditions de travail avant la mise en œuvre de toute réforme.

On mesure, après tous ces mois de combat pour que le point soit inscrit à l’ordre du jour et à la lecture des pauvres documents préparatoires transmis avant ce CHSCTM sur l’impact des réformes dans l’enseignement agricole, le chemin à parcourir pour passer à une réelle prévention primaire dans notre ministere.  Comme le souligne ce même rapport, il y a urgence. C’est la même urgence qui est exprimée par les personnels que nous représentons. Nous rappelons que ces réformes associées au baisse du nombre de fonctionnaires impactent l’ensemble des personnels du Ministère que ce soit ceux des services centraux et déconcentrés ou ceux des EPL.  A ce stade, la question n’est plus de savoir si ces réformes auront des effets sur les conditions de travail des personnels mais bien de mesurer ces effets et comment lutter contre leurs conséquences, voire de décider de renoncer à ces réformes. Ne pas reconnaître les effets des réformes est un déni de réalité qui pourrait avoir des conséquences gravissimes pour les personnels des EPL, des DRAAF / SRFD et de la DGER.

Notre responsabilité de représentant·es des personnels, nous l’assumons collectivement à chaque fois que nous alertons en CHSCT, à chaque fois que nous portons leur parole. Et de la responsabilité de notre employeur, nous attendons et nous exigeons qu’elle soit enfin à la hauteur des attentes et des besoins des agent·es de notre ministere, qu’elle soit enfin à la hauteur de ses obligations légales et réglementaires.

Nous espérons que le CHS CT reconvoqué aujourd’hui prendra la mesure de la dégradation des conditions de travail et des conséquences qu’elles font peser sur les personnels du Ministère de l’Agriculture. Nous ne pourrions accepter une nouvelle fois un déni de réalité de votre part, qu’une fois de plus les avis portés par le CHSCT restent sans réponses, qu’une fois de plus les études d’impact se limitent à des généralités.

Paris le 12 novembre 2019

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