
Groupe de travail du CNEA du 23/9/2025
Groupe de travail du CNEA du 23/9/2025
Faire vivre les valeurs de la République dans l’enseignement agricole
Nicolas GILOT et Jean Pierre NAULIN représentaient FOEA à ce groupe de travail pendant lequel le Document d’Accompagnement (DA) intitulé « Les principes et les valeurs de la République » a été présenté.
Le DA rappelle que depuis 2012, la France est traversée par une série d’attentats et de violences qui ont directement visé l’École et les enseignants, en tant que porteurs des valeurs républicaines. À travers cette entrée, le texte affirme la nécessité de réaffirmer et de partager ces valeurs au sein de la communauté scolaire.
Ce document engage donc tous les personnels de l’enseignement agricole. Transdisciplinaire par essence, il doit fédérer les équipes, ouvrir les débats et déclencher des actions dans chaque établissement.
Il se présente comme une démarche de soutien et d’accompagnement à destination des acteurs de l’enseignement agricole. Le choix revendiqué est de partir des réalités de terrain – classes, établissements, espaces de vie scolaire – plutôt que des seuls grands discours. L’objectif affiché est de conforter les personnels dans leur engagement quotidien et de défendre un « humanisme citoyen ».
Le document s’articule autour de trois axes principaux :
- VIVRE : considérer la classe et l’établissement comme les premiers lieux où s’expriment les principes et valeurs de la République (civisme, civilité, citoyenneté, respect mutuel, inclusion…).
- AGIR : incarner et défendre ces principes par la posture professionnelle des adultes référents, l’exigence de neutralité, l’éthique professionnelle, et les pratiques pédagogiques du quotidien.
- PARTAGER : mettre en commun ces valeurs qui fondent le pacte social et national (liberté, égalité, fraternité, laïcité, solidarité) et les transmettre au travers d’actions éducatives, citoyennes et culturelles.
En complément, le texte s’appuie sur des références philosophiques et pédagogiques (Meirieu, Kahn…), des rappels juridiques (Code de l’éducation, Constitution, Code général de la fonction publique), et propose quelques pistes d’actions ou de ressources (journée de la laïcité, appels à projets, actions citoyennes, sport partagé, etc.).
Un point a particulièrement retenu l’attention de FOEA : la neutralité. Le Document d’Accompagnement y fait référence à quatre reprises, sans jamais la définir. Or, cette notion fait débat dans les établissements comme au sein même de l’Inspection.
Lors de la présentation, l’Inspection a rappelé qu’il existait, dans la recherche en sciences de l’éducation (Kelly, 1986), quatre postures possibles de l’enseignant face aux questions socialement vives :
- Neutralité exclusive : on n’aborde pas les sujets trop sensibles (position jugée inopérante) ;
- Partialité exclusive : l’enseignant exprime son point de vue et cherche à convaincre (également écartée) ;
- Impartialité neutre : on organise le débat sans jamais donner son avis ;
- Impartialité engagée : l’enseignant alimente le débat en donnant un avis, mais sans chercher à imposer sa vision.
L’Inspection a insisté sur la nécessité d’une réflexion collective dans chaque établissement : jusqu’où aller dans l’accompagnement des élèves, dans l’ouverture d’esprit, et dans la transmission des valeurs de la République, sans tomber dans une “impartialité trop engagée” qui brouillerait la posture pédagogique.
FOEA a souligné que ce flou autour de la neutralité — pourtant centrale — fragilise les équipes et alimente les tensions. Nous avons donc demandé que le DA explicite clairement cette notion, en distinguant neutralité et impartialité, et en donnant des repères opérationnels aux personnels.
Au final, FOEA constate que le Document d’Accompagnement (DA) est principalement déclaratif : il réaffirme des principes connus et indiscutables, mais ne propose pas de leviers opérationnels ! Aucune mesure concrète n’est avancée pour aider les personnels à affronter les situations réelles, souvent complexes, dans lesquelles les valeurs républicaines sont mises en tension.
FOEA exige :
- Des ressources pédagogiques adaptées aux réalités diverses des établissements, et pas de simples généralités ;
- Une formation continue accessible à tous les personnels, y compris les non-enseignants, afin de leur permettre de faire face aux situations sensibles (atteintes à la laïcité, discriminations, violences, harcèlement, etc.) ;
- Des outils d’intervention identifiés et efficaces, pour prévenir et traiter les dérives ;
- Des moyens humains et financiers supplémentaires, sans quoi ces ambitions resteront des mots creux et pèseront encore davantage sur des équipes déjà surchargées.
FOEA souligne que sans ces moyens, le risque est grand de voir les valeurs républicaines cantonnées à des déclarations d’intention, loin de la réalité vécue dans les classes, les exploitations, les ateliers, les internats et les espaces de vie scolaire. Or, c’est précisément dans ces lieux du quotidien que se joue la crédibilité de la République.
En conclusion, FOEA a insisté sur l’urgence de passer des mots aux actes : il ne suffit pas d’affirmer, il faut outiller, former, accompagner. C’est à cette condition que les valeurs de la République pourront être réellement incarnées dans l’enseignement agricole, au service de tous les apprenants et de toute la communauté éducative.
