CNEA

Compte rendu du GT CNEA du 9 septembre 2025

FOEA était représentée par Nicolas Gilot, Etienne Lemaire et Jean-Pierre Naulin. Le GT était animé par le sous-directeur des politiques de formation et d’éducation.

1. Contexte général

  • L’épreuve de contrôle du bac pro agricole est aujourd’hui encadrée par l’arrêté du 12 avril 2011 (modifié en 2018) et la note de service DGER/SDPFE/2018-243.
  • Depuis le décret de novembre 2021, l’accès à cette épreuve est conditionné à une moyenne générale comprise entre 8 et 9,9/20 et à une note supérieure ou égale à 10/20 à la moyenne de l’ensemble des épreuves professionnelles. FO EA remarque que cette disposition de 2021, n’est toujours pas appliquée…

  • À compter de la session 2027, une évolution est prévue : possibilité pour le jury de « racheter » un candidat proche de 10/20 de moyenne générale, même si sa moyenne aux épreuves professionnelles est légèrement inférieure à 10/20.

2. Ce qui est proposé ?

Le projet présenté par la DGER modifie l’épreuve de contrôle telle qu’elle existe aujourd’hui.

  • Un oral de 25 minutes sans temps de préparation

      Contrairement au dispositif actuel qui prévoit un temps de préparation permettant au candidat de structurer sa réflexion, l’élève devra désormais se présenter directement devant le jury, avec sa fiche d’activités. FOEA souligne que cette suppression fragilise tout particulièrement les élèves les plus en difficulté, pour qui ce moment de préparation était un soutien indispensable.

  • Une présentation de deux expériences professionnelles

      Le cœur de l’épreuve se réduit à la restitution de deux expériences vécues pendant la formation (stage, activité en atelier, mise en situation professionnelle). L’élève devra choisir deux exemples et en faire un exposé de cinq minutes au maximum. Le document support prévu par la réforme n’est rien d’autre qu’un aide-mémoire décrivant ces expériences. Autrement dit : l’épreuve se résume à « raconter ses stages ». On est très loin d’une évaluation globale des acquis d’un parcours de trois ans.

  • Un échange avec le jury centré sur ces expériences

     Après cette courte présentation, le reste de l’épreuve consistera en des questions posées par le jury pour vérifier que les capacités attendues sont atteintes. Là encore, l’entretien est entièrement recentré sur ce que l’élève a déjà montré en CCF et validé pour accéder à l’épreuve.

  • Trois capacités seulement évaluées

  •  La grille d’évaluation proposée se limite à trois items :

    • Se situer dans son projet personnel et professionnel : l’élève doit dire « où il en est » dans son orientation. Mais FOEA rappelle que nombre d’élèves de bac pro n’ont pas un projet figé à 17 ou 18 ans, et que ce critère risque de discriminer ceux qui sont encore en construction.
    • Présenter les enjeux liés aux transitions et leurs incidences : il s’agit de vérifier si l’élève sait évoquer les transitions (écologiques, énergétiques, alimentaires, etc.) et en tirer des conséquences pour son projet. FOEA souligne le flou et le caractère très inégal de cette exigence, selon les formations, les territoires et les moyens donnés par les établissements. Le risque est de juger des élèves sur leur capacité à faire un discours convenu plus que sur de réelles connaissances.
  • S’exprimer : la seule compétence générale maintenue est la capacité à prendre la parole. Réduire l’évaluation des savoirs généraux à cette seule dimension est une régression majeure. Cela favorise les élèves déjà à l’aise à l’oral et invisibilise toutes les autres compétences de culture générale pourtant essentielles dans un diplôme de niveau 4.

En résumé, pour FOEA l’épreuve de contrôle se transformerait en un oral d’auto-présentation, réduit à un exercice de communication autour du parcours de formation de l’élève, sans exigence réelle sur les savoirs, sans cadrage clair, et avec des critères aussi limités que flous.

FOEA rappelle qu’il ne s’agit à ce stade que d’une proposition, qui doit encore être discutée et peut évoluer avant sa présentation devant le CNEA en janvier 2026.

Mais, en l’état, ce projet est inacceptable : il dévalorise l’épreuve de contrôle, affaiblit la reconnaissance du bac pro et accentue les inégalités entre élèves.

3. Ce que FOEA dit haut et fort

FOEA a porté une analyse sans concession et dénoncé point par point un projet qui met en danger la valeur du bac professionnel agricole.

3.1 Une épreuve redondante

FOEA a dénoncé une aberration : avec cette réforme, on va certifier des compétences professionnelles déjà validées.

Pour accéder à l’épreuve de contrôle, un élève doit déjà avoir obtenu au moins 10/20 sur la moyenne coefficientée des épreuves professionnelles (E5, E6, E7). Cela prouve qu’il maîtrise les compétences techniques attendues. Pourquoi, alors, lui faire à nouveau raconter ses stages et expériences ? Cela n’a aucun sens. Au lieu d’évaluer ce qui lui manque (les capacités générales où il est en dessous de 10/20), on lui demande de repasser ce qu’il a déjà validé. C’est une perte de sens pour le diplôme.

3.2. La disparition des savoirs généraux : une ligne rouge

Un bac professionnel est un diplôme complet, combinant savoirs généraux et compétences professionnelles. Réduire la part générale à la seule capacité « s’exprimer » est une régression inacceptable.

3.3. Un coefficient disproportionné

FOEA dénonce le scandale d’une épreuve de 25 minutes qui pèse autant que deux années de formation. L’avenir d’un élève ne peut pas se jouer sur quelques minutes d’oral.

3.4. Un jury pas toujours adapté

FOEA demande que l’enseignant technique présent dans le jury soit obligatoirement de la spécialité du diplôme présenté par l’élève. Aujourd’hui, ce n’est pas garanti : un élève en agroéquipement peut être évalué par un enseignant d’agronomie. Résultat : des examinateurs qui ne connaissent pas systématiquement les attendus du diplôme.

3.5. Des capacités évaluées floues et inadaptées

FOEA a pointé l’imprécision et le manque de pertinence des trois capacités proposées :

  • Se situer dans son projet professionnel : à 17 ans, nombre d’élèves n’ont pas encore un projet figé. Les sanctionner sur ce critère, c’est les discriminer.
  • Présenter les enjeux liés aux transitions : cette exigence varie fortement selon la spécialité, le territoire et les moyens donnés par les établissements. Rien ne garantit une évaluation équitable.
  • S’exprimer : réduire l’enseignement général à ce seul critère, c’est mépriser l’ensemble des savoirs et compétences. De plus, cela favorise les élèves les plus à l’aise à l’oral, et pénalise ceux qui sont timides ou en difficulté d’expression, alors même qu’ils ont acquis les compétences.

3.6. Problème de neutralité du jury

FOEA a également dénoncé une situation inacceptable : certains élèves sont évalués à l’épreuve de contrôle par un enseignant qui les a déjà examinés en E6 (voire E5 en CGEA).

Cette pratique soulève des soucis de partialité : comment garantir l’objectivité d’un jugement quand l’examinateur se fonde, consciemment ou non, sur l’épreuve précédente ?

Les jurys eux-mêmes reconnaissent l’impasse : lorsqu’un élève n’a « pas brillé » en E5 / E6, l’épreuve de contrôle devient biaisée d’avance.

3.7. Une évolution guidée par la simplification

Pour FOEA cette proposition d’évolution vise surtout à « simplifier l’organisation des examens » et à augmenter artificiellement le taux de réussite, au détriment d’une réelle exigence pédagogique.