
Quand la Région veut prendre la main sur l’enseignement agricole
FOEA interpelle le DGER
Monsieur le Directeur Général,
Le 2 avril dernier, en Région Bretagne, il a été présenté aux représentants des personnels, le fonctionnement de la nouvelle carte de formation, qui ne s’appliquerait, pour l’instant, qu’à cette région.
Ce nouveau mode opératoire inverse la logique de construction de l’offre de formation : ce n’est plus aux établissements de faire remonter leurs besoins et projets pédagogiques, mais au Conseil Régional de définir un « catalogue » auquel les établissements devront candidater… Ce glissement de compétences pose question. En effet, il met ainsi les établissements publics en concurrence entre eux, puis en concurrence frontale avec les structures privées et les MFR. Et ce, malgré une application des règles de fonctionnement différentes. Les critères de sélection restent flous, et c’est désormais, à l’échelle régionale que s’appliquera la règle des ouvertures/fermetures sans distinction public / privé.
Or nous savons que ce dernier bénéficie d’autres leviers : soutiens politiques et économiques.
Dans un contexte de baisse drastique des moyens régionaux, comment les établissements publics pourront-ils faire valoir leurs projets, alors même qu’ils n’ont ni les réseaux, ni les capacités de lobbying du privé ?
Nous avons cru comprendre que cette stratégie trouve son origine dans les annonces du Président de la République en 2023, traduites ensuite dans l’instruction suivante :
https://eduscol.education.fr/document/58047/download
Or, cette instruction ne porte ni l’entête ni la signature de notre ministère. Vous nous aviez pourtant affirmé à l’époque que l’enseignement agricole, fort de ses spécificités, ne serait pas concerné par la réforme des lycées professionnels telle qu’appliquée à l’Éducation nationale.
Dans l’enseignement agricole, lorsqu’un établissement public propose une ouverture, c’est l’aboutissement d’une analyse fine, ancrée dans son territoire.
À l’échelle du conseil régional, les arbitrages risquent d’être dictés par des logiques politiques et économiques.
Nous vous demandons de sanctuariser l’enseignement agricole public, laïc et gratuit, accessible à toutes les familles. D’autant plus que nous savons que, la plupart du temps, l’enseignement agricole public ne bénéficie pas d’une défense indépendante et équitable puisque le SRFD/DRAAF est décisionnaire pour le privé et le public. Les usagers en seront les premières victimes !
FO Enseignement Agricole s’interroge légitimement : Pourquoi suivre les éléments d’une instruction qui ne nous est pas destinée ? Sur quelle base réglementaire la mise en place de cette carte des formations en région Bretagne s’appuie-t-elle ? Cette mise en place en Bretagne, est-elle une expérimentation qui pourrait être appliquée aux autres régions dans un avenir proche ?
Lors du CREA Bretagne du jeudi 15 mai 2025, il a été clairement annoncé par le Conseil Régional que la priorité était donnée aux formations ciblées par la LOA. Que deviennent les formations dites de « commerce, services, nature… » considérées non prioritaires par le Conseil Régional de Bretagne ? À titre d’exemple nous nous permettons de vous rappeler que des formations comme le CAPa SAPVER (Services aux Personnes et Vente en Espace Rural) et le Bac Pro SAPAT (Services aux Personnes et aux Territoires) sont pourtant au cœur des dynamiques rurales. Particulièrement ancrées dans les territoires, elles répondent à une demande sociale croissante en matière de soins, d’aide à la personne, de lien intergénérationnel et de revitalisation des services de proximité. Véritables vecteurs d’insertion sociale et professionnelle, elles jouent un rôle fondamental dans la cohésion des territoires et l’accompagnement des publics les plus fragiles. Les exclure des priorités serait un non-sens social et territorial.
Monsieur Le Directeur Général, quelle est votre position aujourd’hui ? Etes-vous à l’origine de cette évolution ?
Dans l’attente de votre réponse, que nous espérons argumentée et à la hauteur des enjeux soulevés, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Directeur Général, l’expression de notre considération vigilante et déterminée.